Aujourd’hui, dimanche 15 novembre 2020, je reçois Candice Barron.
Elle nous vient tout droit des deux romans « Les Gardiens du Sceau » et « Le Sceau d’Atlasia »
(de Dominique Guenin – Éd.DG & Patte de Velours)
Forester : Bonjour Mademoiselle Barron…
Candice Barron : D’abord, appelez-moi Candice, sinon je vais être mal à l’aise. Bonjour Forester, je suis ravie d’être là aujourd’hui… Pour une fois que je suis de l’autre côté du micro …
F: Comme vous voulez, Candice, mais on garde le vouvoiement quand même ?
CB : Pour le moment, après on verra… (rires)
F : Et bien, ça commence bien dites donc (rires)… Vous m’avez l’air d’une journaliste très détendue, c’est sympa.
CB : La vie est courte et elle peut même être raccourcie en cours de route, avec l’époque dans laquelle on vit, alors il vaut mieux la prendre par le bon côté. Dans mon métier, je suis obligée de rencontrer des gens qui se prennent tellement au sérieux qu’ils me donnent la nausée. J’espère que je ne vous fais pas cet effet au moins ?
F : Oh non, pas du tout (rires). Et comme je vous comprends. Parlez-nous un peu de ce métier qui est une vocation je crois.
CB : Une vocation, je ne sais pas, mais la meilleure direction pour assouvir ma curiosité maladive, oui. Mes parents n’en pouvaient plus de lire les appréciations de mes professeurs : « participe bien en classe, mais devrait laisser un peu ses petits camarades s’exprimer aussi… » Je voulais toujours en savoir plus et je posais des tas de questions qui faisaient souvent dévier le sujet d’un cours vers un autre sujet déduit du premier… Faire des exposés à l’école me passionnait. J’étais toujours la première à lever le doigt pour que les profs me désignent. On avait beau me dire qu’il devait tenir en quinze minutes maxi, j’arrivais avec une heure de discours minimum.
F : Vous êtes curieuse de tout, okay, mais qu’est-ce qui vous plaît le plus dans ce métier ?
CB : Les recherches ! C’est faramineux ce que le genre humain, depuis qu’il existe, a produit comme informations ! Histoire, sciences, médecine, technologies, arts… Je suis seulement attristée par le fait qu’une grande partie du passé, hélas, n’est pas arrivé jusqu’à nous, faute de supports de mémoire. L’écriture est une énorme révolution, la plus importante invention de tous les temps. Pour moi, elle dépasse tout ce qui a été fait après ! Je fais de nombreuses recherches avant de rencontrer les personnes dont mon article doit parler. Le Journal pour lequel je travaille s’appelle « Les frontières de l’Histoire ». Comme son nom l’indique un peu, il traite de sujets qui sont liés à l’Histoire, certes, mais avec une certaine part de mystère, voire même de mysticisme. Mais, il reste un Journal tout ce qu’il y a de plus sérieux, et je ne m’engagerais jamais dans une direction dont je n’aurais aucune maîtrise. Alors, je potasse un maximum pour ne pas me trouver prise au dépourvue devant mon interlocuteur.
F : Pourtant, vous les poussez dans leurs derniers retranchements. J’ai lu quelques uns de vos articles — moi aussi, je me renseigne un peu sur les gens avant de les interviewer (sourires) — et vous semblez dépasser allégrement les limites de l’Histoire pour entrer dans le mystère.
CB : Ah, vous voulez m’entraîner sur ce terrain (rires)… Ne dit-on pas souvent que la réalité dépasse la fiction ? L’Histoire est une suite de faits qui s’imbriquent les uns aux autres, il y a des noms qu’on a retenus parce qu’ils sont écrits dans les livres. Et puis, il y a ceux dont on ne parle pas, mais qui ont aussi fait l’Histoire. Et ces faits-là se transmettent autrement que par l’écriture. Par la filiation par exemple ou par le hasard d’une présence à un moment… Ces transmissions sont aléatoires, transformées, déplacées de leur contexte, il y a beaucoup à laisser, mais aussi un peu à prendre et c’est cette partie-là que j’aime découvrir.
F : Je pense que tout est clair à présent, Candice. Qu’en est-il de Richard Corlay et de sa découverte ?
CB : Vous voulez savoir si je l’ai poussé dans ses derniers retranchements lui aussi ? (rires)
F : Pourquoi pas… Tout au moins, votre rencontre a été assez surprenante non ?
CB : C’est le moins qu’on puisse dire (sourires). J’étais venue assister au Congrès des Sciences de la Terre qui se déroulait à Paris l’année dernière, sur quatre jours. Je m’étais proposé de couvrir l’évènement pour le Journal, bien sûr, parce que la Terre et son histoire m’intéressent à titre personnel et j’espérais des nouveautés pour un article. Il y en a eu, bien sûr, ce grand Congrès est là pour ça, mais rien de véritablement intéressant pour les Frontières de l’Histoire. J’ai vu arriver ce dernier jour avec la joie de celle qui voit la fin d’une séance de torture. J’étais même prête à abdiquer avant le dernier exposé, et je suis restée finalement. Le sujet, c’était : « », sûr que j’allais me mettre à ronfler ! Mais dès les premiers mots, j’ai compris qu’ils n’avaient rien à voir avec le sujet. J’ai commencé à voir les gens s’agiter dans la salle et siffler le dernier conférencier qui parlait de remise en question de l’échelle des temps géologiques. J’ai prêté l’oreille et je me suis que ce type là-bas, sur son estrade, il n’avait rien d’un illuminé contrairement à ce que tous pensaient dans l’amphi. Je me suis rapprochée, il y avait tellement de chahut dans la salle que je n’entendais pas ce que disait Richard. C’est au moment où un projectile venu du public a atterri tout prêt de lui, qu’il s’est décidé à quitter la place. Mais, alors qu’il reprenait toutes ses notes, il a laissé tomber quelque chose sur l’estrade. J’ai attendu un peu que sa fuite calme les esprits et j’ai bondi pour récupérer l’objet : un petit carnet de notes tout griffonné. Et je suis sortie pour aller lui rendre, mais il était en train de s’engouffrer dans un taxi avec son ami Rudy. Je suis alors rentrée chez moi et j’ai trouvé son numéro de téléphone sur le site du Congrès et je l’ai appelé pour lui dire que j’avais son carnet et lui demandé quand on pouvait se voir pour que je le lui rende. Mais, je n’ai pas pu m’empêcher de regarder dedans. Je suis curieuse, je vous l’ai dit déjà, non ? (rires).
F : Oui, il me semble… Alors, qu’avez-vous trouvé ?
CB : Des pattes de mouches, des petits croquis, des points d’interrogations, des mots lancés au hasard… un vrai fourre-tout de réfractaire à la technologie !
F : Rien pour assouvir votre chère curiosité alors ?
CB : Pour le coup, ces pages tenaient plus du mystère que de l’Histoire ! J’ai cru que j’avais affaire au carnet d’un déjanté plutôt que d’un doctorant en sciences !
F : Et vous saviez, à ce moment-là, que Richard Corlay n’avait rien d’un scientifique justement, mais qu’il était spéléologue ?
CB : Non, mais quelques minutes après, oui. Parce que j’ai recherché ses données sur le site du congrès. J’avais étudié le profil de beaucoup d’intervenants avant ce congrès, mais pas le sien.
F : Et ce carnet alors ?
CB : Au milieu de ces notes incompréhensibles, un dessin sur une page a attiré mon attention et j’ai compris qu’il n’avait rien d’un fou. Peut-être dans sa façon de vouloir bousculer les esprits, il faisait fausse route, mais cette page était la preuve qu’il était tout à fait sensé et qu’il avait mis le doigt sur une mine, une mine d’or ou une mine anti-personnel, en tout cas un peu des deux, vu tout ce qui s’est passé après ça…
F : Richard Corlay ne nous a pas donné trop de détails. Voulez-vous nous en parler Candice ?
CB : Vous venez de donner la réponse à votre propre question (rires). Si Richard n’a pas donné plus de détails, je n’en donnerai pas non plus.
F : D’accord, je respecte et je pense que nos lecteurs aussi. Il me reste à vous remercier d’avoir accepté de venir sur Radio Mots-cœurs, Candice, et j’espère vous recevoir à nouveau, comme Richard d’ailleurs, il me l’a promis.
CB : Merci à vous et merci de ne pas m’avoir poussée dans mes derniers retranchements (rires).
F : Ce n’est que partie remise, je vais étudier vos méthodes en attendant de vous recevoir à nouveau (rires).
CB : C’est de la triche… Et bien, pour la peine, on en restera au vouvoiement (rires).
F : En tout cas, merci pour votre bonne humeur Candice, et à bientôt…
Chers amis fidèles de Radio Mots Cœurs, je vous dis à très bientôt. Et portez-vous bien. Bye